Le retable de notre église

D’après Mr le Chanoine Lévèque (chronique de mars 1903), le retable représentant l’Assomption de la Sainte Vierge, qui vient d’être classé « monument historique », est l’œuvre d’un artiste local.  

Il fut marchandé vers 1750 (par Mr le curé Monnier) pour 600 francs barrois, à un sculpteur sur bois nommé Jean-Joseph Remy, originaire du Girmont. Il épousa Jeanne Durupt, fille ou petite-fille du procureur fiscal. De leur union, naquirent plusieurs enfants, seule une fille survécut.

Remy s’aperçut bientôt que le travail était plus onéreux que prévu et sa fortune personnelle bien compromise par cette entreprise. Après avoir englouti son bien propre dans la construction du retable et la moitié de la fortune de sa femme, il partit pour Nancy vers 1750 où il trouva un travail plus lucratif. Il revint au Val-d’Ajol pour convaincre sa femme de le suivre, mais elle ne voulut rien entendre. Il repartit seul et dès lors, on ne reçut plus aucune nouvelle, ni put découvrir où il était. Avant son départ, il avait promis à Mr Monnier qu’il enverrait des ouvriers pour achever le travail. La promesse ne fut pas tenue et Mr Monnier fut obligé de faire venir des sculpteurs pour exécuter l’encadrement, le retable lui-même étant en grande partie terminé.

Ce récit transmis par feu Mme Roussel (une descendante de Nicolas Girardin) mentionnait les noms corrects, seules les dates étaient inexactes, mais nous avons retrouvé dans les actes de baptêmes, mariages et décès, confirmation et preuve de ces allégations. Ainsi, l’on retrouve trace des enfants Remy :

Le 30 septembre 1754, naquit du mariage de Jean-Joseph Remy, charpentier, et de Jeanne Durupt, une fille, Jeanne Élisabeth, qui vécut peu de temps.

Le 17 septembre 1757, naissait une autre fille, Jeanne-Catherine. Son parrain était Maître Jean-Étienne Valdenaire, avocat à la cour, et sa marraine, demoiselle Catherine Durupt, son épouse. Elle se marie à l’âge de 24 ans, le 16 octobre 1781, avec Nicolas Girardin, taillandier à Laître. Le mariage se fait avec le consentement des parents de l’un et du seul parent de l’autre, puisque le père de Jeanne-Catherine Remy est absent depuis plus de vingt ans, sans que l’on ait reçu de ses nouvelles. Toutefois, Jeanne Durupt a présenté une requête aux juges tutélaires de la haute justice du Val-d’Ajol, afin d’être autorisée à contracter le mariage de sa fille, requête agréée en août 1780.

La jeune femme mourut après neuf mois de mariage, le 1er août 1782, après avoir fait promettre à son amie d’enfance, Jeanne Leclerc, sur un crucifix ciselé par Remy (conservé chez Mr Julien Vial, père de Mr le curé d’Archettes) qu’elle épouserait son mari. De ce mariage naquirent six enfants. Jeanne Leclerc mourut de frayeur alors que son mari, considéré comme aristocrate au temps de la révolution, était sur le point de payer de sa vie son attachement à la foi catholique.

Pour en revenir au retable, il est en chêne et mesure 3 mètres de haut sur 2 de large. Il est constitué de douze apôtres autour d’un tombeau vide et d’une Vierge en son Assomption, environnée de nuages et entourée d’anges. En 1885, le conseil de fabrique décida de vendre deux colonnes de l’encadrement, identiques aux deux colonnes actuelles mais positionnées plus proches de l’autel, qui voilaient un peu trop les vitraux du chœur.

Mr Pierre Monnier, originaire du Dauphiné, était sous-prieur du monastère d’Hérival avant de devenir curé du Val-d’Ajol, de 1741 à 1774. Il organisa plusieurs missions qui s’achevèrent par la construction de croix sur divers points du territoire. La plupart sont conservées, elles portent la mention « Bénite par Pierre Monnier Curé ».