Un clin d’œil à d’illustres Ajolais

Texte de Daniel GURY, (historien de la commune).

La Toussaint est l’occasion pour les vétérans de rappeler à leur entourage quelques souvenirs des ancêtres.

Mais laissés à l’abandon parfois depuis des lustres, stèles et autres monuments se dégradent et menacent parfois de s’écrouler. 

Les communes font alors le ménage en respectant les formalités d’usage mais parfois à l’insu des familles par fautes de témoignages. Car les familles sont de plus en plus dispersées pour répondre à des obligations professionnelles ou familiales.  Du coup, il n’est pas rare que des concessions, même lorsqu’elles sont dites perpétuelles, disparaissent pour faire place nette.

 Ainsi la tombe du maire Villemin décédé à 53 ans a un jour disparu elle aussi du cimetière de la commune, dont il fut pourtant le maire, et dans une parfaite indifférence. C’était il y a une vingtaine d’années.

Le maire Jules Villemin licencié en sciences était né à Celles sur Plaine en 1877 mais sa famille s’installera ensuite à Plombières. Il vivra donc une partie de sa jeunesse dans la cité thermale pour ensuite prendre la direction de l’usine de Buyer à Faymont et seconder le comte et futur maire Amaury de Buyer souvent obligé de s’absenter.

Maire du Val-d’Ajol de 1925 à 1930, Villemin avait pris la succession d’Émile Balandier dont il partageait les idées. Villemin est mort à la suite d’une courte hospitalisation à Nancy où il avait été transporté pour ce qui paraissait une banale grippe mais qui va se compliquer d’une pleurésie qui lui sera fatale.

 L’une de ses sœurs travaillait d’ailleurs à cet hôpital comme religieuse.

Il venait à peine d’être élu comme conseiller d’arrondissement le 6 avril de la même année avec 1 152 voix sur 1813 votants de sa commune. Hélas, il n’aura même pas eu le plaisir de siéger. C’est Marcel Deschaseaux de Plombières qui lui succédera à ce poste.

Une autre tombe était signalée comme devant être reprise par la commune pour cause d’abandon. Celle de l’ancien ferblantier Jean Phloryen Germain décédé en à l’âge de 37 ans en 1885 laissant une veuve de 35 ans née Mathiot avec deux enfants à charge de 6 et 16 ans.

Pourtant cette concession au cimetière du Val-d’Ajol est repérable car elle dispose d’une magnifique chapelle en granit.  Elle se situe en amont de la chapelle de la famille de Buyer.

 Ce jeune industriel qui n’avait pas froid aux yeux natif de Cornimont a été un précurseur dans la fabrication des articles de ménage.

Demeurant dans l’immeuble commun avec le café Français, grande rue, il avait installé son entreprise de l’autre côté de la rue. Dix petits ateliers avaient été construits par ses soins, chacun étant spécialisé pour un usage déterminé :   nettoyage, décapage, galvanisation et étamage, repoussage, ajustage, bardage, peinture, emballages, magasins, remises et écuries.

Enfin, Germain après s’être installé dans la commune de son épouse à l’âge de 22 ans avait rapidement agrandi sa petite entreprise par le rachat d’une autre usine sur les bords de la rivière l’Ognon aux environs de Melisey avec tout son outillage dont une trentaine de tours, machines à emboutir et à découper, le tout actionné par une turbine et une machine à vapeur de 25 cv.

Hélas, suite au décès prématuré de son fondateur en 1885, l’entreprise est mise en liquidation en 1887.

Les immeubles situés vers les ateliers sont rachetés par la banque Parisot de Plombières. Elle y installera une agence bancaire dont l’enseigne apparaîtra sur diverses cartes postales.

 Ainsi, à défaut de successeur, l’entreprise Germain qui employait sur ses deux établissements plus d’une quarantaine d’ouvriers disparaîtra quasiment sans laisser de traces.

L’unique souvenir est cette petite chapelle qui contient tout de même une gerbe de fleurs artificielles. A priori, la présence de cette gerbe témoignerait que l’un des enfants a probablement fait carrière dans l’enseignement mais loin du Val-d’Ajol, à l’autre bout du département.